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Toute contre-vérité peut être bonne à dire, surtout avant les midterms

On le sait Donald Trump n’a que faire de la réalité et des faits. Sa conseillère Kellyane Conway n’avait-t-elle pas inventé les « alternative facts », une nouvelle catégorie qui transforme les faits en une notion fluctuante en fonction de celui qui les formule ? Rudy Giuliani avait même osé dire : « la vérité n’est pas la vérité ! ». Etonnant pour un juriste qui a dû faire répéter la formule si connue :

Do you solemnly swear that you will tell the truth, the whole truth, and nothing but the truth?

Donc, la terre pourrait être plate ou ronde, en fonction des interlocuteurs et des objectifs visés. Et pour obtenir encore un meilleur résultat, on peut les mélanger avec des intentions ou des promesses qu’on tiendra ou pas, peu importe.

Dans ces derniers jours de campagne, Donald Trump n’a pas été avare en fausses annonces, contre-vérités, mensonges, outrances… avec comme seul objectif : conforter sa base dans ses opinions et renforcer la peur.

Il y a eu l’épisode des taxes. Le président annonçait qu’il allait mettre en place une nouvelle baisse d’impôts de 10 % pour les classes moyennes. On avait pourtant compris que la réforme fiscale de décembre dernier avait été la plus importante de toute l’histoire des Etats-Unis. Pourquoi en faudrait-il une nouvelle ? Cette nouvelle baisse d’impôts devait être votée d’ici une semaine. Surprenant lorsque l’on sait que le Congrès n’est pas en session.

Il y a eu ensuite la promesse que les républicains défendaient la couverture maladie et en particulier la clause des « pre-existing conditions » qui empêchent les compagnies d’assurance de prendre en compte les antécédents médicaux pour faire exploser leur tarif. Pour le moins surprenant quand on sait que le mot d’ordre des Républicains depuis des années vis-à-vis de l’Obamacare est « repeal and replace ». Repeal, ils n’y sont pas arrivés, replace, ce n’est pas leur problème. Les démocrates ne s’y sont pas trompés en mettant ce sujet de la couverture maladie au cœur des débats.

Puis ce fut l’épisode des milliers d’Honduriens qui remontent à pied vers la frontière américano-mexicaine pour fuir les conditions de vie inhumaine dans leur propre pays. Evidemment, c’est là un sujet parfait pour attiser les peurs. Alors qu’ils sont encore à plus de mille miles de la frontière, ils sont présentés comme un danger imminent.  A trente kilomètres par jour (un rythme plus que soutenu lorsqu’on a des enfants), on peut estimer à deux mois, la durée du voyage. Et pour finir, combien se présenteront à la frontière ? Donald Trump aurait-il lu Le Cid de Corneille ?

Nous partîmes cinq cents ; mais par un prompt renfort
Nous nous vîmes trois mille en arrivant au port,
Tant, à nous voir marcher avec un tel visage,
Les plus épouvantés reprenaient leur courage!
J’en cache les deux tiers, aussitôt qu’arrivés,

L’épisode d’avril nous a montré que peu iront jusqu’au bout. Face à la menace « imminente », Donald Trump a ordonné l’envoi de 5 200 militaires sur la frontière en remplacement des deux milles agents de la garde nationale. Pour ensuite annoncer qu’il allait réfléchissait à envoyer un nouveau contingent pour atteindre les 15 000 militaires. Plus que les forces présentes en Afghanistan (14 000) et en Irak (5 000). Le message est clair : le président vous protège. Afin de distiller une vague de terreur, Donald Trump a publié sur son fil twitter une vidéo infamante (il suffit de regarder ci-dessous). Donald Trump a affirmé qu’il y avait des terroristes moyen-orientaux dans la « caravane », sans preuve. Mieux, un expert de Fox News n’a pas hésité à dire que la caravane pourrait apporter la variole et la lèpre aux Etats-Unis. Sauf que la variole a été éradiquée de la planète il y a une quarantaine d’années[1].

 

Pour voir la vidéo postée par DT aller sur le fil twitter (https://twitter.com/realDonaldTrump)

Cet épisode était une occasion rêvée pour relancer le débat sur l’immigration. Le débat n’a jamais été abandonné d’ailleurs. Donald Trump s’est transformé en juriste en chef en annonçant qu’il allait publier un décret pour changer le code de la nationalité et abolir la notion de Birthright Citizenship. Sauf qu’il faudrait changer ou interpréter différemment la section 1 du 14e amendement.

Toute personne née ou naturalisée aux États-Unis, et soumise à leur juridiction, est citoyen des États-Unis et de l’État dans lequel elle réside.

Ceux qui remettent en cause la lecture de cet amendement s’appuient sur la partie de la phrase « et soumise à leur juridiction ». Mais le cas a été tranché dans l’arrêt de la Cour Suprême United States v. Wong Kim Ark (1898) qui a désavoué le gouvernement américain en l’empêchant de refuser la nationalité américaine à un enfant d’immigrés américains qui n’avaient pas eux-mêmes la nationalité américaine.

Paul Ryan, le Speaker de la Chambre, qui ne s’est pas beaucoup fait entendre pendant ces deux années, a déclaré que ce n’était pas possible. Il est devenu immédiatement une cible du président via un revers de tweet.

Il reste entre 4 jours avant les élections. Largement le temps pour Donald Trump de réactiver encore quelques controverses.

__________
[1]
La variole a été totalement éradiquée le 26 octobre 19771, grâce à une campagne de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) combinant des campagnes de vaccination massive, dès 1958, avec une « stratégie de surveillance et d’endiguement », mise en œuvre à partir de 1967. Au XXIe siècle, seuls des échantillons de ce virus sont conservés à des fins de recherche par des laboratoires habilités par l’OMS (source : Wikipedia)

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