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Vers un retour en force du syndicalisme ?

28-fevrier21On a beaucoup parlé du plan de relance, de l’élaboration du budget et de nombreuses questions économiques (j’aurai largement le temps d’y revenir). Mais l’actualité sur le passage de l’Employee Free Choice Act qui est actuellement soumis au vote du Congrès a elle été beaucoup moins médiatisée, alors que il s’agit sans doute d’une évolution importante.

Cette proposition de loi a été introduite par le sénateur Ted Kennedy et deux représentants, l’un démocrate et l’autre républicain.  Cette loi a été votée par la Chambre des Représentants, mais a fait  l’objet d’une menace de filibuster (une flibuste) de la part de républicains au Sénat alors qu’elle bénéficiait du soutien de la majorité.

L‘Employee Free Choice Act va donc être de nouveau soumis au vote d’un nouveau Congrès assez largement démocrate. De quoi s’agit-il ? En gros de faciliter la représentation syndicale dans les entreprises.

Le syndicalisme était jusqu’ici placée sous le National Labor Relations Act (NLRA) qui a été promulguée en 1935 et était destinée à protéger les droits de salariés et de leur donner un pouvoir de négociation vis-à-vis de leur employer en matière de salaires, de conditions de travail, avantages sociaux…

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Obama sur les lobbies et les syndicats

« De mon point  de vue, il y a une grande différence entre les lobbies des entreprises et des individus qui se regroupent en association qu’il s’agisse de salariés de l’industrie du textile, les aficionados d’armes, les vétérans ou les agriculteurs pour défendre leurs intérêts. Entre ceux qui utilisent leur puissance économique pour accroître leur influence politique au-delà de leur représentation et ceux qui cherchent simplement  à réunir leurs votes pour renforcer leur idées. Les premiers subvertissent l’idée même de la démocratie ; les seconds la renforcent ».

Barack Obama – The Audacity of Hope – Politics – Vintage Books – page 139

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Mais selon un document publié par le think tank Economic Policy Institute, cette loi a été altérée par des décennies d’amendements et d’initiatives des entreprises pour affaiblir son application. Voté en 1947, le Taft-Hardley Act d’inspiration républicaine a restreint les prérogatives des syndicats. On est au tout début de la sale période du Maccarthisme et une des dispositions de cette loi est assez surprenante. Les dirigeants syndicaux sont obligés de prêter serment de non-communisme. Cette disposition est déclarée inconstitutionnelle en 1965. Selon l’AFL-CIO, le plus important syndicat américain, les entreprises engagent toutes sortes d’actions pour entraver les actions des salariés pour constituer des syndicats. Et de citer, Lee Scott, ex CEO de Walmart qui n’a pas la réputation d’entreprise sociale : « Nous aimons conduire la voiture et nous n’allons certainement pas donner la volant à quelque d’autre que nous ».

Une quarantaine d’économistes de premier plan dont deux prix Nobel, Kenneth Arrow et Robert Solow, et des professeurs des meilleures universités (Harvard, Berkeley, MIT, Columbia, Princeton, Duke, Northwestern…) ont acheté une pleine page de publicité dans le quotidien Washington pour publié un manifeste pour appeler le Congrès a voter cette loi pour « aider à restaurer l’économie qui fonctionne pour tous basée sur une croissance durable des salaires ».

Car aux Etats-Unis comme dans nombre de pays – dont la France – cette période de trente années d’administration républicaine a coïncidé à un accroissement des inégalités. Dit simplement, les pauvres se sont appauvris et les riches se sont enrichis. Et il ne s’agit pas seulement d’affirmation mais de constatation. « De 2000 à 2007, le revenu annuel médian (le revenu qui partage la population des salariés en deux parties égales) a baissé de 2000 dollars, ce qui n’était jamais arrivé auparavant, affirment-ils. Tout le supplément de croissance est allé à une minorité d’Américains nantis ». Le rêve américain se serait-il dissipé ?

Parallèlement, le syndicalisme s’est largement érodé de telle sorte que seulement 7,5% des salariés du secteur privé sont représentés par des syndicats. Et pourtant, selon l’AFL-CIO, 60 millions d’Américains qui ne sont pas syndiqués déclarent qu’ils seraient prêts à rejoindre un syndicat. Entre 1987 et 1997, le taux de syndicalisation dans l’industrie a diminué de 7% par an et de 5% dans la décennie qui a suivi.

Quelles sont les relations entre le taux de syndicalisation, le niveau des salaires et la compétitivité de l’économie.

Toujours selon l’AFL-CIO, « les salariés qui sont syndiqués gagnent 28% de plus que ceux qui ne le sont pas, ce qui représentent une différence moyenne 200 dollars par semaine ou 10 000 dollars par an ». Il en va de même pour les autres avantages sociaux : couverture santé, retraites…  et de poursuivre : « Cette nouvelle permettra aux salariés, non aux entreprises, de choisir s’ils souhaitent et comment ils souhaitent former une association syndicale.

Le syndicalisme « plombe-t-il » la performance d’une économie ? Question essentielle qui revient bien souvent dans les arguments du patronat, qu’il soit américain ou non. Les statistiques consolidées par le FMI et l’OCDE ne montrent pas aucune évidence permettant de répondre positivement à cette question. Elles auraient plutôt tendance à mettre en évidence le contraire. Le schéma ci-dessous indique plutôt une corrélation positive ente le taux de syndicalisation et la balance commerciale. Les Etats-Unis qui ont le plus faible taux de syndicalisation des pays industrialisés ont également le déficit le plus fort.

« Je soutiens l’Employee Free Choice Act pour deux raisons, explique James Galbraith (le fils de John Kenneth, le très célèbre économiste), professeur à l’Université du Texas. D’abord, il change les règles du jeu après une génération de politiques contre le syndicalisme… ensuite, les syndicats ont prouvé qu’ils étaient un allié du progrès, pas seulement sur le plan politique mais aussi économique. Il favorise les changements technologiques et l’augmentation de la productivité (…) ».

28-fevrier11

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