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Afghanistan : chronique d’un désastre annoncé

La 8e saison de la série Homeland traite principalement du problème afghan avec un accident spectaculaire d’hélicoptère dans lequel les présidents américain et afghan trouvent la mort alors qu’ils allaient signer un accord de paix. La fiction dépasse ici la réalité même si Joe Biden a dû reprendre ce très délicat dossier que lui avait laissé son prédécesseur. Dossier pour lequel il n’y a que des mauvaises solutions.

Dans les derniers jours de son mandat, Donald Trump avait annoncé le retrait des troupes américaines des terres afghanes, environ 3 500 soldats. Le départ était prévu au 1er mai. Ce départ n’était conditionné par rien, L’administration américaine demandait simplement aux Talibans de faire preuve de bonne volonté mais n’exigeait aucun engagement. Et dans ces négociations, elle n’avait pas inclus le gouvernement afghan. Une situation pour le moins étonnante.   

Récupérant ce dossier très difficile, Joe Biden, qui n’a jamais été partisan de maintenir la présence américaine sur ces contrées inhospitalières, a aménagé la décision de Donald Trump en repoussant le départ des boys au 11 septembre, date du 20e anniversaire de l’attaque contre les Twin Towers de New York. Quant à l’arrangement avec le gouvernement afghan et les Talibans, il était difficile de revenir dessus.

Les troupes américaines sont donc en train de partir laissant derrière eux une situation fragile et un pays ouvert aux initiatives des Talibans et des groupes terroristes. Mais ce qu’une présence militaire pendant vingt ans n’a pas réussi à faire, avec un contingent de plus de 130 000 hommes, une poignée de 3 000 militaires pourrait-elle le faire ? On ne peut qu’en douter. Peut-être cette présence pouvait-elle maintenir une sorte de statu quo, même très instable, de l’équilibre des forces entre le gouvernement afghan et les Talibans.

Ashraf Ghani a publié un article dans la revue Foreign Affairs intitulé « Afghanistan’s Moment of Risk and Opportunity, A Path to Peace for the Country and the Region » dans laquelle il donne sa vision sur la période qui s’ouvre alors que les militaires américains ont commencé leur départ du « Pays des Pachtounes » et qu’il considère comme « another phase in our long-term partnership with the United States ». Une vision qui doit être très différente de celle des Talibans pour qui les Etats-Unis ont envahi et occupent leur pays.

Le président Afghan semble retenir une « stick and carrot approach » en leur demandant « To avoid that fate, the Taliban must answer critical questions about their vision for Afghanistan. Will they accept elections, and will they commit to uphold the rights of all Afghans, including girls, women, and minorities? » et en indiquant qu’une réponse négative à ces questions et un refus de négocier serait « choosing the peace of grave » (expression répétée à deux reprises).

Ashraf Ghani adopte une position ouverte tout en étant réaliste : « Negative answers to those questions were suggested by the Taliban’s recent decision to pull out of a peace conference that was supposed to begin in Istanbul at the end of April. The Taliban, it seems, remain more interested in power than in peace. A political settlement and the integration of the Taliban into society and government is the only way forward. But the ball is in their court. »

Les événements qui se succèdent ne laissent pas beaucoup d’espoir sur la volonté des Talibans de trouver un compromis avec le gouvernement afghan. Une attaque à la bombe dans une école a fait plus de 80 morts, essentiellement des filles, et plus d’une centaine de blessés. Il s’agit de l’école Sayed Ui-Shuhada située dans la banlieue de Kaboul qui fait école de garçons le matin et de filles l’après-midi. L’attentat visait donc les filles puisqu’il a été perpétré l’après-midi. De plus, il est intervenu dans le quartier des Hazaras, une minorité chiite, dans un pays à majorité sunnite, qui a fait l’objet de violence répétée.

Pour l’instant, l’attentat n’a été revendiqué par aucun groupe. Le président Ghani a blâmé les Talibans alors que ces derniers, par la voix de son porte-parole Zabihullah Mujahid a condamné cet attentat, ce qui ne constitue pas une quelconque preuve. Cet attentat s’inscrit dans une suite qui commence à être longue ces dernières semaines, les Talibans souhaitent montrer leurs muscles pendant cette période de transition. Il semble assez clair que les Talibans profitent du départ des troupes américaines pour exercer une pression sur le gouvernement afghan et augmenter le contrôle qu’ils ont du territoire (actuellement, il est estimé qu’ils contrôlent la moitié du pays, principalement les zones rurales). La perspective qu’ils puissent à nouveau gouverner le pays, comme ils l’avaient fait de 1996 à 2001, et imposer une loi islamique dure – en particulier sur le droit des femmes ou plutôt le retour à une situation où les femmes ne peuvent plus aller à l’école, ne peuvent plus travailler – n’est pas à exclure.

Dans son article, le président Ghani fait référence à la résolution 2513 des Nations Unies qui indique que le monde (i.e. les Nations Unies), ne souhaite pas le retour des Talibans au pouvoir (« Notant que l’Émirat islamique d’Afghanistan n’est pas reconnu par les Nations Unies et que le Conseil de sécurité de l’ONU n’est pas favorable à la restauration de cette entité »). Mais cela ne devrait pas impressionner outre mesure les Talibans. Il rappelle son souhait d’un Afghanistan « sovereign, Islamic, democratic, united, neutral, and connected ». A part un Afghanistan islamique, on ne voit pas trop ce qui pourrait intéresser les Talibans. En dernier, il en appelle au Pakistan de cesser de jouer son rôle de partenaire des Talibans. Dans le cas contraire, Islamabad serait alors considéré comme ennemi dans la nation afghane.

Bref, la situation est assez compliquée et on ne voit pas trop ce qui pourrait éviter le pire dans un pays qui connaît la guerre depuis plus de 40 ans.

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Zabihullah (..ذبـــــيح الله م) Zabehulah_M33 # Response:

We condemn today’s bombing in the Dasht-e-Barchi area of Kabul, which was carried out on civilians and unfortunately caused heavy casualties. Such actions are the work of nefarious groups operating under the guise of Kabul administration and intelligence under the name of ISIS.

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