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Have you left no sense of decency ?

« Senator, may we not drop this? We know he belonged to the Lawyers Guild … Let us not assassinate this lad further, Senator. You’ve done enough. Have you no sense of decency, sir? At long last, have you left no sense of decency? »

A cette interpellation de Joseph Nye Welch à Joseph McCarthy, le porte-drapeau de la chasse anticommuniste des années 50, ce dernier essayé de répondre, mais il fut interrompu à nouveau

« Mr. McCarthy, I will not discuss this further with you. You have sat within six feet of me and could have asked me about Fred Fisher. You have seen fit to bring it out. And if there is a God in Heaven it will do neither you nor your cause any good. I will not discuss it further. I will not ask Mr. Cohn any more witnesses. You, Mr. Chairman, may, if you will, call the next witness ».

Un échange qui se termina par des applaudissements et mit un terme à cette chasse aux sorcières.

Malgré les deux mois d’atermoiement, de minimisation, d’attaques des médias et des démocrates pour en faire un nouveau motif pour déstabiliser le président, Donald Trump n’a pas hésité à s’attribuer un 10/10 sur sa gestion de la crise et a déclaré : « I felt it was a pandemic long before it was called a pandemic. » On croit rêver.

Qui sera le Joseph Nye Welch qui remettra Donald Trump à sa place et ne pas lui permettra de réécrire l’histoire ? Même si le changement de ton et de stratégie est assez clair depuis deux jours.


En Inde, le roi, qui s’ennuie à la cour, demande qu’on lui invente un jeu pour le distraire. Le sage Sissa invente alors un jeu d’échecs, ce qui ravit le roi. Pour remercier Sissa, le roi lui demande de choisir sa récompense, aussi fastueuse qu’elle puisse être. Sissa choisit de demander au roi de prendre le plateau du jeu et, sur la première case, poser un grain de riz, ensuite deux sur la deuxième, puis quatre sur la troisième, et ainsi de suite, en doublant à chaque fois le nombre de grains de riz que l’on met. Le roi et la cour sont amusés par la modestie de cette demande. Mais lorsque le roi l’a mise en œuvre, il s’aperçut qu’il n’y a pas assez de grains de riz dans tout le royaume pour la satisfaire.


Selon les chiffres du site Johns Hopkins Center for Health Security, au vendredi 20 mars à 16h heure française, il y a 246 444 cas recensés, 10 400 morts et 86 036 personnes guéries de la maladie. Donald Trump, qui n’aurait pas bien compris l’histoire du sage Sissa, pourrait continuer de plastronner. Si la Chine, la Corée du Sud semblent tirées d’affaire, l’Europe doit se préparer au pire. La situation en Italie est catastrophique. Les reportages du Bergame où l’armée a été réquisitionnée pour transporter les cadavres dans des centres de crémation et les familles privées de cérémonie funèbre font froid dans le dos. L’Espagne suit la même trajectoire et la France pourrait aussi faire face aux mêmes difficultés. Quant aux Etats-Unis, dont le président qualifie toujours le Coronavirus de « virus chinois », les chiffres semblent indiquer qu’ils suivent la même trajectoire, sans doute pire. Si l’on en juge par le nombre de cas recensés, dont on sait que ce n’est pas un indicateur fiable puisqu’il dépend du nombre de tests effectués, les Etats-Unis sont dans une mauvaise situation. Et à ce jour, la politique de la Maison-Blanche est assez simple : peu de directives au niveau national et que les gouverneurs des Etats se débrouillent, l’état pourra éventuellement les aider. Le résultat, chaque état, chaque ville sont un peu livrés à elle-même.

 

Dans ces conférences quotidiennes, Donald Trump donne de fausses informations ou de faux espoirs. Les masques seront disponibles par millions, les hôpitaux en manquent cruellement (la France fait-elle mieux ?), deux bateaux-hôpitaux militaires seront arrimés sur les deux côtés, cela prendra des semaines, Donald Trump invoque le Defense Act sauf qu’il ne le met pas en action, des médicaments seront un « game changer », la FDA rappelle que même avec des procédures expresses ce n’est pas pour demain, quant au vaccin, n’en parlons même.

On le sait, la clé de la gestion de cette crise est d’aplatir la courbe des cas afin de pouvoir traiter les cas graves qui en auront besoin. Dans cette bataille, le nombre de places en soin intensif et de respirateurs est une des clés. Un article du Johns Hopkins Center for Health Security (Get Ready for a 1918-like Scenario) s’est livré à un petit calcul. L’expérience chinoise montre qu’il faudrait 259 lits de soins intensifs (ICU) par million d’habitants. On estime à 46 500 lits ICU aux Etats-Unis soit 178 par millions d’habitants. Sachant qu’à tout moment, entre 70 à 80 % sont occupés, encore plus pendant la période de grippe qui n’est pas finie. Ce qui donne entre 36 à 53 lits ICU par million d’habitants. Les hôpitaux peuvent transformer des équipements existants et doubler ainsi le parc. Si l’on ajoute aussi des installations mobiles et d’autres modifications d’installations existantes, l’article arrive au chiffre de 214 lits ICU. Ce qui n’est pas suffisant. Il en va de même pour les respirateurs.

Ses apparitions quotidiennes montrent que, malgré quelques tentatives d’apparaître présidentiel, il retrouve ses instincts habituels : dénie de la réalité, affabulation, hyperbolie… Les responsables de crises qui l’entourent et sont agglutinés autour de lui (c’est bon à la télévision) sont dans deux catégories : ceux qui disent ce que dit le chef, ceux qui n’osent pas le contredire ouvertement, mais rectifient ensuite.

Pour l’heure, les chiffres pourraient sembler rassurant lorsqu’on les compare à la grippe espagnole. Mais c’est là une fausse vision. Les expériences de la ville de Wuhan ou du Nord de l’Italie sont pires que l’épidémie de 1918. Le taux de létalité dans ces deux régions est deux fois plus élevé que ce qu’ont vécu les Etats-Unis en 1918 où l’on dénombre officiellement 675 000 morts. Cette situation oblige à opérer une sorte de grand écart mental : sur le plan individuel, cette maladie est peu létale et chaque malade (en moyenne) à 98 % de s’en sortir guéri, sur le plan global, il n’est pas difficile de calculer le nombre de morts à 30 ou 50 % d’une population données lorsqu’on applique le taux de mortalité moyen.

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