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Entreprises : entre relation publique et propagande

La réforme fiscale (La réforme fiscale des inégalités et du déficit) votée en décembre dernier par 51 républicains sans l’appui d’un seul démocrate avait fait l’objet d’un activisme intensif des lobbies de toutes sortes. A eux seuls, les trois associations professionnelles – the US Chamber of Commerce, the National Association of Realtors et the Business Roundtable – ont dépensé 56 millions de dollars sur le dernier trimestre 2017 pour influencer le Congrès. Dans une note intitulé Swamped, le Think Tank Public Citizen a recensé 6 243 lobbyists – plus de la moitié de lobbyistes présents à Washington – qui sont intervenus à l’occasion de cette réforme fiscale, soit 11 lobbyistes par élu du Congrès.  Difficile d’y échappé et de soutenir la pression.

Dès la loi votée, de nombreuses entreprises se sont lancées dans une surenchère de communication en essayant d’établir une relation entre la réforme fiscale et les mesures entreprises, laissant supposer que les secondes étaient la conséquence de la première. Tim Cook, le CEO d’Apple avait été un des premiers à tirer parti de l’aubaine de communication pour se parer des atours de la société citoyenne. La firme de Cupertino a bénéficié du soutien de Donald Trump qui la félicitant se félicitait lui-même. Mais lorsque l’on rentre dans les détails, la réalité est beaucoup plus contrastée (Apple : la compagnie à double face).

Le CEO d’ExxonMobil Darren Woods avait indiqué dans un post sur son blog que l’entreprise projetait d’investir 50 milliards de dollars dans les 5 prochaines années. Il se trouve que c’est en fait 2,7 milliards de moins que les années précédentes.

Disney a annoncé qu’elle accordait généreusement un bonus à ses 125 000 salariés tout en menaçant les salariés syndiqués de leur supprimer cette « largesse » s’ils n’acceptaient pas l’offre d’un nouveau contrat de travail. Cette offre avait déjà été rejetée par les syndicats en décembre.

Dans cette course à l’échalotte de la société la plus citoyenne, Walmart n’est pas en reste. Rappelons que les trois héritiers Jim, Robson et Alice possèdent une fortune cumulée de l’ordre de 130 milliards de dollars et situent respectivement à la 15e, 16e et 17e place du classement Forbes. Mais on le sait, Walmart n’a pas la réputation d’une entreprise qui « fait dans le social ». L’entreprise avait annoncé, elle aussi, un bonus de 1000 dollars pour ses salariés. Mais là encore le diable est dans les détails car il faut comprendre en fait un bonus allant jusqu’à 1000 dollars. Pour en bénéficier, un salarié doit avoir 20 ans d’ancienneté. Hors l’ancienneté moyenne chez le géant de la distribution est de 3,3 ans ce qui donne doit à une « généreuse prime » de 250 dollars. Dans le même, l’entreprise, en difficulté face à la concurrence montante du commerce en ligne et de son géant Amazon, a annoncé également la suppression de milliers d’emplois dans les magasins et dans les bureaux.

Comcast, AT&T, Pepsi, Kimberly-Clarke… la liste des entreprises qui ont participé à cette propagande généralisée est longue et sans doute loin d’être close. Mais paradoxalement plus l’annonce est proche de la date de la réforme fiscale et plus elle doit être examinée de manière approfondie car il est assez simple à comprendre que les entreprises ne prennent pas des mesures sans en avoir examinée les conséquences. A l’inverse, pour tirer le plus grand parti de cette vaste opération de relation publique et, le cas échéant, s’attirer les bonnes grâces de la Maison-Blanche.

Mais il y avait aussi une raison beaucoup plus pratique et concrète à le faire. Les entreprises pouvaient déduire la charge des bonus si elles en faisaient l’annonce avant la fin de l’exercice 2017. Sans avoir d’obligation à les distribuer tout de suite. C’est ce qu’explique le Think Thank Center for Economic and Policy Research l’explique simplement dans un article (The Bonus Game: How Congress Paid Off Corporate America to Tout Its Tax Cut) sur son blog :

« Si une entreprise comme Walmart ou AT & T accordait à ses travailleurs 100 M$ de primes ou d’augmentations salariales en 2018, cela lui coûterait 79 millions de dollars après impôt, compte tenu du nouveau taux d’imposition des sociétés de 21%. Cependant, si la même prime de 100 millions de dollars était annoncée avant la fin de 2017, elle ne coûterait à la société que 65 millions M$ de bénéfices après impôt puisqu’elle pourrait être déduite dans une année où le taux d’imposition était de 35%. (Ces calculs supposent que les entreprises paient réellement le taux d’imposition marginal.)

Cela signifie, en effet, que le gouvernement aurait versé 14 millions de dollars à ces entreprises pour annoncer une prime avant la fin de l’année. Puisque nous croyons tous que les entreprises répondent aux incitations, il ne devrait pas être surprenant que beaucoup de primes annoncées avant la fin de 2017 ».

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