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Criminalité et perception de la criminalité

Criminalité, inflation et immigration sont les trois thèmes majeurs sur lesquels les républicains incriminent régulièrement les démocrates et tout particulièrement Joe Biden. Dans les débats qui se sont tenu régulièrement à l’occasion des élections de mi-mandat, ils répètent à l’envi que tous les problèmes actuels auxquels font face les Etats-Unis sont la faute des démocrates en s’attribuant le titre du parti de la loi et de l’ordre (Law and Order).

La criminalité (les homicides) est repartie à la hausse en 2020, avant que Joe Biden soit président. Mais cela ne suffit pas comme argument pour les républicains, on se souvient de la fable de La Fontaine.

Lorsqu’on rétorque que c’est dans les états gérés par des gouverneurs républicains (du Sud notamment) que la criminalité est la plus élevée[1] comme le montre l’étude réalisée par le Think Tank Third Way (Criminalité et majorité politique), les républicains répondent qu’en fait, c’est dans les grandes métropoles de ces états dirigées par des démocrates qu’elle est la plus forte. Mais ce n’est pas la réalité. Et pourtant New York City serait un des endroits les plus sûrs des Etats-Unis. Mais comme le fait remarquer Justin Fox (mentionné dans une tribune de Paul Krugman : Crime: Red Delusions About Purple Reality), lorsqu’un crime est commis dans une zone à haute densité de population, il est « visible » par un nombre plus important de personnes.

Le fait que le phénomène soit mondial, en tous cas dans les pays occidentaux (ce qui n’est pas une consolation) montre qu’il n’est pas directement et exclusivement de la responsabilité de Joe Biden. Mais peu importe, il suffit de marteler l’argument : la criminalité est en hausse à cause des démocrates et les républicains sont les mieux placés pour régler ce problème.

On ne le sait que trop, pour la criminalité comme d’autres phénomènes, il y a toujours une différence entre la réalité et la perception de cette réalité, entre les faits et les croyances. Dans sa tribune, Paul Krugman rapporte que, alors que le nombre de crimes violents (violent crime[2]) a été divisé par deux entre 1991 et 2014 (phénomène pour lequel on n’a pas vraiment d’explication), les enquêtes réalisées pendant cette période révélaient qu’une majorité d’Américains pensaient que la criminalité était en hausse. Les républicains considèrent que c’est le laxisme des juges qui serait responsable de cette hausse de la criminalité. Mais alors, le durcissement des peines pendant la période 1991-2014 pourrait expliquer la baisse. Or il n’en n’a rien été et il n’y a pas eu de durcissement de la politique pénale. Rappelons au passage que les taux des Etats-Unis est largement plus élevé que celui de tous les pays comparables.

Dans certains débats, les candidats ne se donnent même plus la peine d’argumenter. Ils se contentent de reprendre ce que l’intuition pourrait suggérer. Pour preuve l’échange entre la candidate démocrate Joy Hofmeister et le candidat républicain Kevin Stitt, dans le débat pour les élections au poste de gouverneur de l’Oklahoma :

« The fact is the rates of violent crime in Oklahoma are higher under your watch than New York and California. That’s a fact » expliquait Joy Hofmeister, superintendant de l’instruction publique de l’état qui a changé de parti l’année dernière.

« That’s not true » répondit en souriant Kevin Stitt, gouverneur en exercice. « Oklahomans, do you believe we have higher crime than New York or California? ».

L’important n’est plus la réalité, mais ce qu’on croit.


[1] Mais contrairement à ce qu’affirment les républicains, les Etats où la criminalité est la plus élevée ne sont pas à tendance démocrate mais sont ceux où Donald Trump était majoritaire lors des élections de 2020. Ni même des zones plutôt urbaines. Selon l’étude publiée par le Think Tank Third Way basé sur des données publiques (The Red State Murder Problem), sur les dix états où la criminalité est la plus élevée, huit ont voté majoritairement pour Donald Trump en 2020.

[2] In a violent crime, a victim is harmed by or threatened with violence. Violent crimes include rape and sexual assault, robbery, assault and murder (Source : National Institute of Justice)

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