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Le marathon verbal de Kevin McCarthy

Le filibuster n’a beau s’appliquer qu’au Sénat, Kevin McCarthy a utilisé le filon pour différer autant que possible le vote du projet de loi Build Back Better (« reconstruire au mieux », un nom bien mal choisi qui sonne un peu comme le MAGA – Make American Great Again et qui n’est pas explicite) de 1 800 milliards de dollars et qui concerne pour l’essentiel des dépenses sociales (President Biden Announces the Build Back Better Framework – 20 octobre 2021).

Le leader de la majorité républicaine à la Chambre des représentants a commencé son discours jeudi soir à 20h38 pour terminer un peu après 5 heures du matin le lendemain, parlant pendant 8 heures et 32 minutes et battant ainsi le record de Nancy Pelosi qui, en 2018, alors qu’elle était leader de la majorité démocrate à la Chambre pendant le mandat de Donald Trump, pendant un peu plus de huit heures.

« Mr. Speaker, I think I owe an apology because I understand the Democrats have left and they want to recess when I’m done. And Mr. Speaker, I, I don’t know if they think they left, I’m going to stop. I’m not, I’m really not talking to them. I’m talking to the American people. This is the longest one minute I’ve ever given. It’s the longest one minute ever given in this body. There’s a reason why. This is a tipping point. This is a point of not coming back from. The American people have spoken. But unfortunately, Madam Speaker, the Democrats have not listened. This evening showed that no matter the time, the day or the circumstances, House Republicans will always fight for you, fight for your family and fight for our country. With that, Madam Speaker, I yield back », ponctua-t-il son discours sous les applaudissements des quelques élus républicains restés dans l’hémicycle.

« Il know some of you are mad at me, think I spoke too long », avait-il glissé pendant son interminable monologue. Mais en fait, il ne s’agissait là que d’une opération de diversion et d’obstruction car cette initiative ne change rien et n’a fait que reporter de quelques heures la procédure de vote. Vote qui est intervenu un peu plus tard dans la journée à 220 voix pour et 212 contre, la majorité étant à 218 voix. Aucun républicain n’a voté pour ce projet de loi.

Cette diarrhée est bien surprenante chez Kevin McCarthy alors qu’il a été bien silencieux lors des nombreux excès de certains élus de son groupe parlementaire. Le dernier en date étant celui de Paul Gosar et de la publication d’une vidéo animée dans laquelle le personnage qui l’incarnait tuait sa collègue Alexandria Ocasio-Cortes et attaquait Joe Biden. Mais il y en a eu beaucoup d’autres qui auraient mérité à tout le moins un rappel à l’ordre et qui n’ont pourtant suscité aucune réaction de sa part. Le représentant de l’état de Californie vise le poste de Speaker dans l’hypothèse d’une reprise de majorité lors des midterms. Fidèle parmi les fidèles de Donald Trump, il ne souhaite donc pas se mettre à dos ses collègues dans une telle éventualité.

Il faut reconnaitre parler pendant plus de huit heures n’est pas chose facile surtout lorsque l’on veut apporter un minimum de cohérence. Mais tout est possible comme lire le bottin téléphonique ou son équivalent d’aujourd’hui. Kevin McCarthy n’est pas allé jusque-là mais a balayé des sujets très larges allant l’initiative de défense stratégique de Ronald Reagan à son amitié personnelle avec Elon Musk, le fondateur de Tesla en passant par une longue digression de la peinture présentant George Washington traversant la rivière du Delaware lors de la bataille de Trenton. Mais il y eu aussi la Chine et sa responsabilité dans l’épidémie de la Covid-19 ou ses missiles hypersoniques et ses copies de bateaux américains. Il est même allé jusqu’à affirmer que même les Chinois ne renforceraient pas leurs administrations fiscales comme souhaitent le faire les démocrates pour forcer les citoyens à payer leurs impôts. Mais aussi l’inflation (à 31 %), le prix de l’essence, Thanksgiving ou encore l’immigration sur la frontière mexicaine.

Difficile de parler pendant si longtemps sans dire des bêtises, inconscientes ou délibérées. Au palmarès des contre-vérités et des mensonges on pourrait retenir la suivante : « More than one million people who lost their job after President Biden was sworn in because he shut down a pipeline. » Pourquoi pas 10 millions ?

Ou encore

« We’re going to take taxes from you so somebody who makes $800,000 can get a tax break to buy a Tesla. »

Cet effort n’aura donc servi à rien puisque le projet de loi a été voté par la Chambre des représentants et est en route vers le Sénat en utilisant la procédure de réconciliation permettant de rendre le filibuster inopérant. Mais pour qu’il soit définitivement adopté et être signé par Joe Biden, les démocrates ne peuvent se permettre aucune défection, ni celle de Joe Manchin ou de Kyrsten Sinema (Joe Manchin, le Démocrate qui voulait détruire Biden).

James Stewart gives a passionate speech on the floor of the United States Congress condemning the corruption and greed that pervades the American political system.

Inutile de dire que Kevin McCarthy n’est pas James Stewart. « It is a feat of epic proportions to speak for four hours straight and not produce a single memorable phrase, original insight or even a joke » a commenté le représentant Representative Jamie Raskin (D-Md) complétant sur Twitter : « McCarthy thinks he is a wit but so far he has proved he is only half right. »

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