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La Chine, puissance globale à l’assaut de la première place

La défense européenne prise en charge par les Etats-Unis dépendait de la menace soviétique depuis la guerre froide, russe depuis 1991. Cette menace s’est transformée peu à peu en une préoccupation, un aquilon qui s’est mué en zéphyr, un ouragan catégorie 1 rétrogradé avec le temps en catégorie 5. Petit à petit, le danger s’est déporté de la Russie vers la Chine, devenue une puissance mondiale, première ou seconde en fonction des secteurs et des disciplines. Plusieurs indicateurs montrent cette montée en puissance en quelques décennies. On pourrait en prendre un qui pourrait surprendre, le nombre des médailles aux Jeux Olympiques, qui montre sa montée en puissance rapide. On le sait, le sport est désormais un élément de puissance d’un pays. L’Allemagne de l’Est en son temps l’avait développé comme un outil de propagande. Depuis plusieurs JO, la Chine a désormais remplacé l’URSS puis la Fédération de Russie comme challenger des Etats-Unis. En 2008, aux J.O. de Pékin, les Chinois avaient même dépassé les Etats-Unis.

En 1950, la Chine représentait moins de 5 % du PIB mondial et sa part dans le commerce mondial inférieure à 1 %. Le PIB Chinois a plus que décuplé ces 15 dernières années alors que celui des Etats-Unis n’a que doublé. Aujourd’hui, le PIB chinois est encore assez loin de celui des Etats-Unis en termes réels mais il l’a dépassé en parité de pouvoir d’achat.

La puissance chinoise serait-elle venue de nulle part ? C’est peut-être ce que pensent nombre d’Américains alors qu’en fait elle a été pendant longtemps la première puissance économique mondiale à une époque où surtout la puissance militaire comptait.  En 1820, alors que Napoléon venait tout juste de régner sur toute l’Europe, la Chine représentait 36 % de l’économie mondiale. La période de déclin, depuis cette période d’ouverture économique de Den Xiao Ping au tout début des années 80, est donc perçue comme une aberration et non une normalité. Comme le rappelle David Goldman, ancien banquier de la Bank of America et du Crédit suisse cité par Pierre-Antoine Donnet dans son livre Le leadership mondial en question :

« La Chine a été la puissance manufacturière au cours des mille dernières années. Puis, elle a chuté il y a environ deux cents ans, au début de la révolution industrielle. Les Chinois considèrent ceci comme une aberration et veulent rétablir la primauté de la Chine. Ils tiennent la primauté technologique, à la fois en matière d’innovation et de contrôle des marchés mondiaux, comme la clé de la puissance et de la prospérité chinoises ».

Mais après la période assez catastrophique pendant la période Mao (période de 1949 à 1979 que l’on pourrait qualifier de trente calamiteuses) « synonyme de marasme économique et de grandes vagues de famine, de chaos économique et politique », le renouveau de la Chine n’était pas gagné. Même si Alain Peyrefitte avait prévenu dans son essai publié en 1973 : « Quand la Chine s’éveillera… le monde tremblera ». Une phrase qui viendrait d’une déclaration attribuée à Napoléon (« Laissez donc la Chine dormir, car lorsque la Chine s’éveillera le monde entier tremblera »). Cette ascension au sommet de l’Empire du Milieu a été à la fois rapide et spectaculaire. Depuis 2010, la Chine est premier exportateur, première puissance industrielle, second importateur, ses réserves de changent dépassent les 3 000 milliards de dollars.

Avec son plan « Made in China 2025 », elle ambitionne aussi de devenir premier dans nombre de technologies : informatique (dont informatique quantique et intelligence artificielle), robotique, aérospatiale, industries navales et ferroviaires[1], énergie, matériel agricole, nouveaux matériaux et biométriques.  On a longtemps avancé l’idée que l’innovation n’allait pas de pair avec les régimes autoritaires et qu’elle ne pouvait pas émerger dans des pays où l’éducation ne misait pas l’inventivité et la créativité (comme aux Etats-Unis) mais plus sur la reproduction et la copie. On voit les limites de cette pseudo-théorie. Si elle a atteint ce niveau de développement exceptionnel, elle le doit sans aucun doute à ses propres efforts et investissements mais aussi à des moyens plus troubles comme le transfert de technologie forcée ou pillage de propriété intellectuelle.

Le Washington Post a sélectionné 7 domaines technologiques montrant cette évolution foudroyante. Mais il en reste (au moins) un où les Chinois accusent encore un retard important, celui des semiconducteurs, principalement les microprocesseurs dans lequel les Américains dominent assez largement. Un domaine hautement stratégique puisque les microprocesseurs constituent l’intelligence de tous les systèmes électroniques.

La Chine va-t-elle rattraper et dépasser durablement les Etats-Unis ? On se souvient que la question avait été posée dans les années 80 avec le Japon. Et puis, la réponse avait été apportée avec la crise bancaire et financière des années 90. Certes, avec la Chine se pose avec plus de forces et la réponse est encore plus complexe.

Pierre-Antoine Donnet cite les défis qui se posent à la Chine aujourd’hui qui pourrait enrayer son développement : Une démographie en panne, une innovation technologique, une corruption rampante qui étouffe le Parti et la société, un manque cruel de soft power, un isolement durable dans le monde. Autant d’éléments qui font que la Chine ne peu prétendre durablement au premier rang mondial (Jacques Gravereau, fondateur et directeur de directeur HEC Eurosia).

« La président Donald Trump est le premier dirigeant occidental à oser défier au grand jour la puissance chinoise » considère avec raison l’auteur du livre. D’autres responsables emprunteront-ils le même chemin ? poursuit-il. On a la réponse à nos dépends pour l’instant avec l’accord militaire et technologique signé par Joe Biden avec l’Australie et le Royaume-Uni. Certains pensent que cet accord aggrave les tensions entre les deux superpuissances et rend le monde plus dangereux. D’autres considèrent qu’il s’agit d’une démarche qui mettra un holà aux volontés de puissance et d’hégémonie de la Chine. La question est posée, la réponse reste à écrire.

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[1]
Le réseau de transport ferroviaire en Chine est devenu le deuxième du monde avec plus de 144 000 km de voies en juillet 2020 dont près de 39 000 km de voies à grande vitesse et le premier en termes de voies électrifiées avec 100 000 km de lignes soit 69,5 % de son réseau (décembre 2020). La longueur du réseau a ainsi été multiplié par sept depuis 1949.

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