Aller au contenu Skip to footer

GOP : 1854 – 2018 ?

 « Le parti républicain n’a eu ni Washington, ni Jefferson, ni Madison, ni Hamilton, ni Jackson. Son apparition fut en fait, le mouvement populaire, le plus authentique de l’histoire américaine »[1] écrit l’historien Clinton Rossiter. Sa création, en 1854, est tout à son honneur puisqu’il est né de « son hostilité à l’extension de l’esclavage dans les Territoires, ces contrées lointaines qui n’étaient pas encore devenues des Etats mais avaient vocation à l’être. Il s’est donc d’emblée affronté aux démocrates, largement implantés dans le Sud. Pour se constituer, il a fait appel à des personnes provenant d’horizon très divers ; chez les Whigs, les Démocrates, les Free-Soilers, Les Abolitionists, les Know-Nothings… »

Et le premier président issu de ce parti, Abraham Lincoln, est souvent considéré comme le plus grand président de l’histoire des Etats-Unis. Il a dû affronter la période la plus difficile de l’histoire des Etats-Unis, la guerre de Sécession qui a faillé diviser le pays en deux, et fit voter le 13e amendement sur l’abolition de l’esclavage. Un sujet magnifiquement mis en scène dans le film Lincoln de Steven Spielberg.


AMENDMENT XIII
Passed by Congress January 31, 1865. Ratified December 6, 1865.

Note: A portion of Article IV, section 2, of the Constitution was superseded by the 13th amendment.

Section 1.
Neither slavery nor involuntary servitude, except as a punishment for crime whereof the party shall have been duly convicted, shall exist within the United States, or any place subject to their jurisdiction.

Section 2.
Congress shall have power to enforce this article by appropriate legislation.


« Paradoxalement, les échecs des républicains sont intimement liés à leurs succès » poursuit Clinton Rossiter :
– Ils ont apporté une solution à l’esclavage (…) mais ont dédaigné le conseil de Lincoln et ont poursuivi une politique de vengeance tout au long de la période de Reconstruction ;
– Ils ont fertilisé l’industrie américaine de façon libérale mais les gros profits allèrent aux grosses fortunes ;
– Ils ont joué dans les années vingt, le rôle d’un parti conservateur au pouvoir en un moment où l’Amérique était arrivée, à une situation entièrement nouvelle, sur le plan intérieur comme sur le plan international ; mais ils n’étaient pas prêts à faire face à la rupture de l’ordre ancien ».

Pendant les 50 ans qui ont suivi cette sombre période, le parti républicain est peu à peu devenu le parti du business et des intérêts des grandes entreprises. Puis, arriva la Grande Dépression qui mis un terme à une domination de près d’un demi-siècle avec « l’accablante défaite de Herbert Hoover face à Franklin Delano Roosevelt ». Ce fut alors une période de domination démocrate qui culmina avec la Grande Société de Lyndon Johnson, le mouvement des droits civiques et les grandes réformes sociales, notamment dans le domaine de la santé avec la création du Medicaid et du Medicare.

Au début des années 80, Ronald Reagan fut à l’initiative de la grande révolution conservatrice et le parti Républicain devint, selon l’expression du démocrate Daniel Patrick Moynihan, « le parti des idées ». Ronald Reagan mis à exécution trois idées majeures : réduction drastique des impôts (tax cuts) selon la théorie du ruissellement, le moins d’état, l’état étant devenu le problème, et une augmentation massive des dépenses de défense pour épuiser l’URSS. Les deux premières entraînèrent une augmentation des inégalités quasiment continue jusqu’à aujourd’hui réduisant la classe moyenne censée faire la force et la vitalité de la société américaine. La dernière conduisit à l’explosion de l’URSS et à redevenir la Russie. Mais, même très affaiblie, cette dernière joue encore un rôle majeur sur la scène internationale.

Depuis Ronald Reagan, c’est l’alternance qui rythme la présidence américaine : Ronald Reagan et George H.W. Bush pour les républicains, puis Bill Clinton pour les démocrates, George W. Bush pour les républicains, puis Barack Obama pour les démocrates et en 2016 contre toute attente et en dépit des prévisions, Donald Trump pour les républicains.

En fait, Donald Trump n’est pas républicain. Pour preuve, n’a-t-il pas changé à de nombreuses reprises son appartenance politique ? Et la seule idée qu’il serait sans doute prêt à défendre est Donald Trump. Son projet « American First » a été décrié ces derniers par John McCain, devenu un des opposants républicains en chef :

To fear the world we have organized and led for three-quarters of a century, to abandon the ideals we have advanced around the globe, to refuse the obligations of international leadership and our duty to remain “the last best hope of earth” for the sake of some half-baked, spurious nationalism cooked up by people who would rather find scapegoats than solve problems is as unpatriotic as an attachment to any other tired dogma of the past that Americans consigned to the ash heap of history.

En tant que candidat en 2008, John McCain avait lui aussi flirté avec le populisme en choisissant Sarah Palin, une des égéries du Tea Party, comme co-listière.

“Le parti républicain est devenu une filiale de Donald Trump”
Mark Shields, Columnist

Son autre slogan, « drain the swamp » (nettoyer le marigot), vise à mettre en grand coup de pied dans la fourmilière de ce qu’il appelle l’establishment, à commencer par celui dans son propre parti ou plutôt le parti dans le cadre il a brigué la présidence. Donald Trump n’a pas compris la notion de checks and balances et pensait pouvoir décider de tout et gouverner seul. Eventuellement, avec une majorité au Congrès la tâche lui était facilitée.

Et puis, les mois ont passé et aucune loi majeure n’a été votée. Il s’en est alors pris aux sénateurs et aux représentants, incapables, à ses yeux, de voter quoi que ce soit. Sans doute pas la meilleure attitude pour débloquer la situation. Du coup, la question leur est posée : doivent-ils se lever contre Donald Trump ou doivent-ils courber l’échine et faire allégeance à ce nouveau parti que Donald Trump est en train de forger. Le parti Républicain se transforme peu à peu en Parti de Trump. C’est le sens de l’article de Greg Weiner, professeur en sciences politiques au Assumption College, « : « It’s all about the president now ».

Pour l’instant, ceux qui ont fait entendre leur voix n’ont plus rien à perdre. John McCain ne se représentera pas en 2023, il aura 87 ans. Il n’a donc rien à perdre. Ce fut ensuite le tour de Bob Corker et de Jeff Flake, le premier après des déclarations fracassantes et suite à une passe d’armes via des tweets interposés avec Donald Trump et le second avec un discours au Sénat qui fera date. Mais, là encore, les deux sénateurs ont jeté l’éponge pour les midterms car ils sont dans une position délicate dans les primaires républicaines. Et les autres qui, selon de nombreux journalistes et analystes, ne se gênent pas pour critiquer le président en privé se gardent bien de le faire en public, de peur de se faire étriller lors des prochaines élections et/ou de devenir une cible pour Donald Trump.

Et peu à peu, le parti républicain est en train de devenir le parti de Trump et de changer complètement son logiciel. Dans son discours, Jeff Flake a rappelé les grands principes qui structure la pensée des conservateurs :  un état limité, des marchés libres, le libre-échange, le soutien de l’immigration. Depuis, l’ère Reagan, les républicains ont soutenu une imposition minimale et la réduction de la dette et sur le plan international, une ouverture sur le monde. Et sur le plan institutionnel, le respect du principe de l’équilibre des pouvoirs (checks and balances), la démocratie et the rules of laws et la références à des principes. Avec Donald Trump, une partie de ces principes a été balayé. Lorsqu’il avait demandé à James Comey de lui être loyal, Donald Trump montrait qu’il considérait le gouvernement comme une affaire d’hommes et non de principes.

Steve Bannon, dont le pouvoir est peut-être exagéré depuis qu’il a quitté la Maison Blanche, poursuit le dessein de Donald Trump en voulant détruire le parti républicain tel qu’il est aujourd’hui. Et cela commence par mettre en péril les 8 sénateurs républicains qui se présenteront devant les électeurs en 2018.  Deux (Bob Corker et Jeff Flake) ont déjà fait les frais de cette attaque en règle, d’autres pourraient suivre. Et cela ne l’empêche pas de tirer à boulets rouges sur l’establishment républicain dont il veut la perte, à commencer par son patron, Mitch McConnell, le chef de la majorité au Sénat.

  1. Barrasso, John (R-WY)
  2. Corker, Bob (R-TN)
  3. Cruz, Ted (R-TX)
  4. Fischer, Deb (R-NE)
  5. Flake, Jeff (R-AZ)
  6. Hatch, Orrin G. (R-UT)
  7. Heller, Dean (R-NV)
  8. Wicker, Roger F. (R-MS)

 « Aucun homme n’a été à l’origine de la création du Parti républicain » remarque Clinton Rossiter, mais un homme, Donald Trump, sera peut-être responsable de sa disparition. Le métier devenu obsession de Donald Trump a consisté à mettre son nom en grandes lettres sur des bâtiments. Il pourrait bien arriver à mettre le sien sur le Parti Républicain. En lettres d’or bien sûr.


In response to Senator Jeff Flake’s surprise announcement that he will not seek re-election,DNC Chair Tom Perez released the following statement: 

“Senator Flake voted with Donald Trump 91% of the time. His retirement is symbol of a Republican Party whose leaders allow Donald Trump’s divisive politics to flourish as long as it serves their political interests, and who fail to criticize this dangerous president until it’s too late. Unfortunately, Republicans in Congress remain in lockstep with the Trump agenda and silent in the face of the president’s disgraceful behavior.

“The last thing Arizonans need is another rubber-stamp Republican for Donald Trump’s reckless right-wing policies that hurt working families. Democrats will always fight for the families in Arizona and across the country who want leaders that will stand up to politicians who want to take away health care, raise taxes on the middle class, and restrict women from making their own health decisions.”


[1] Rossiter, Clinton; Parties and politics in America; Ithaca, N.Y., Cornell University Press; (1960)

Leave a comment

Recevez les derniers articles directement dans votre boîte mail !

Un Jour en Amérique © 2024. Tous droits réservés. 
Consentement des cookies