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Le numérique, prochaine bataille de Donald Trump contre l’UE

Cela ne date pas d’aujourd’hui. Déjà, Anthony Blinken, le Secretary of State de Joe Biden, avait fait par de ses préoccupations à la Commission européenne sur les niveaux de sécurité dans le cadre de la norme EUCS qu’elle souhaitait mettre en place et qui pourrait gêner les géants américains du numérique. En septembre 2023, Antony Blinken a adressé à Ursula von der Leyen une note diplomatique sévère dans laquelle il affirme à propos du niveau High+, je le cite : “Including these provisions in the final scheme could also negatively impact the U.S.-EU bilateral economic and security relationship.”

Que croyez-vous qu’il advint ? La réaction ne s’est pas fait attendre, car, dans la foulée, à l’automne 2023, la Commission ordonne à l’European Union Agency for Cybersecurity (ENISA) de revoir sa copie, expliquait Henri d’Agrain, délégué général du Cigref[i].

Dans une récente interview à Fox News (Fox News Host Laura Ingraham Clashes With Trump in Fiery Interview) donnée dans le bureau ovale – il faudrait le rebaptisé le bureau doré -, Donald Trump dit tout le bien qu’il pense des Français qui, selon lui, seraient pires que les Chinois. Notamment, en mettant en place des réglementations qui gênerait les géants américains du numérique.

Depuis 2017, Donald Trump répète le même argument : les États-Unis seraient les grandes victimes d’un déséquilibre commercial massif, en particulier face à l’Europe. Après avoir signé l’accord (infamant ?) avec Ursula von der Leyen en août, il a averti que si l’Europe ne se défaisait pas des réglementations dans le numérique, il serait obligé de revoir sa copie, i.e. d’augmenter les droits de douane.

Le déficit entre les États-Unis et l’Europe qui fâche Donald Trump est trompeur, car il ne prend en compte que les échanges de biens matériels, en excluant délibérément les services, où les États-Unis enregistrent pourtant un excédent considérable sur l’Europe — dans la finance, la technologie, la propriété intellectuelle ou encore le conseil. Trump ne l’évoque jamais, car ce déséquilibre inversé contredit son récit d’une Amérique spoliée. Ce n’est donc pas une approximation, mais une manipulation volontaire des données destinée à nourrir un discours nationaliste et à justifier une politique commerciale agressive.

Un contraste saisissant apparaît lorsqu’on examine les chiffres réels de la dépendance numérique européenne. Une étude du cabinet Asterès, réalisée pour le Cigref, évalue à 264 milliards d’euros par an le coût supporté par l’économie européenne pour ses achats de logiciels et de services cloud américains. Autrement dit, la dépendance numérique de l’Europe envers les États-Unis atteint le même ordre de grandeur que le déficit commercial que Trump brandit à des fins politiques. Sans parler de la dépendance technologique des entreprises européennes face aux entreprises américaines du numérique. Mais Donald Trump n’en n’a cure et adopte l’attitude du « si ce n‘est toi, c’est donc ton frère ». Les Européens qui pensaient avoir assuré une certaine stabilité avec l’accord signé en août en seront sans doute pour leurs frais. Pour Donald Trump, un accord n’est pas un engagement formel entre deux ou plusieurs États ou organisations, c’est juste un document qu’il faut remettre en cause au plus vite pour en signer un nouveau, plus avantageux.


[i] Association des grandes entreprises et administrations publiques françaises, le Cigref se donne pour mission de développer leur capacité à intégrer et maitriser le numérique.

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