En transposant les Etats-Unis dans une cour d’école, on qualifie souvent le président de bully, quelqu’un fait du mal ou fait peur aux autres exprès, et de manière. Il essaie de rendre une autre personne triste, faible ou effrayée – souvent pour se sentir fort ou populaire. Il prendra presque plaisir à
- pousser ou frapper un autre élève.
- Se moquer de quelqu’un ou lui donner des surnoms méchants.
- Exclure un camarade d’un jeu exprès, pour qu’il se sente seul.
- Prendre les affaires des autres, comme le goûter ou un jouet.
- Menacer de faire du mal si la victime en parle à la maîtresse ou au maître.
- Rire d’un camarade quand il tombe ou se trompe.
Donald Trump est toujours prêt à commencer un nouveau conflit. Après les démocrates, les médias, les juges, les universités, les cabinets d’avocats, Il a trouvé son nouveau bouc émissaire, l’État de Californie, et plus particulièrement la ville de Los Angeles qui doit accueillir les Jeux olympiques en 2028. Le prétexte choisi est celui de l’immigration, car il sait qu’il bénéficie d’un assez large soutien de la population sur ce sujet.
Los Angeles est devenu le symbole national de la bataille entre Donald Trump et les autorités locales, le gouverneur Gavin Newsom et la maire de la ville Karen Bass. Ci-dessous, un rapide résumé des événements intervenus ces derniers jours.
Vendredi 6 juin
À la suite de raids musclés orchestrés par l’ICE à Los Angeles, une centaine de personnes sont interpellées. Des manifestants se rassemblent au centre-ville et à Paramount, lançant des objets vers les forces de l’ordre en réaction. L’ICE riposte avec grenades assourdissantes et gaz lacrymogènes.
Samedi 7 juin
En réponse à cette mobilisation, le président des États‑Unis ordonne le déploiement de 2 000 membres de la Garde nationale, via le Titre 10 (c’est la première fois depuis 1965 qu’un tel déploiement se fait sans la demande du gouverneur, c’était en l’occurrence Lyndon Johnson pour défendre les droits civiques).
Le gouverneur Gavin Newsom et la maire de L.A. Karen Bass dénoncent vivement ce déploiement, parlent de « provocation » et saisissent la justice. La ACLU y voit un « abus » de pouvoir.
Dimanche 8 juin
Plusieurs milliers de personnes manifestent pacifiquement puis se heurtent aux forces fédérales à proximité du Metropolitan Detention Center. Des interventions policières basées sur gaz lacrymogènes et balles en caoutchouc sont menées. Les manifestants bloquent l’autoroute 101, des véhicules sont incendiés et une soixantaine de personnes arrêtées durant le week-end.
Un photojournaliste britannique est blessé par un projectile non létal.
Lundi 9 juin
Malgré une majorité de manifestations pacifiques même s’il y a eu certains débordements, la violence persiste : jets de pierres depuis des ponts et incendies de voitures autonomes Waymo. Le gouvernement Trump envoie 2 000 Gardes nationaux supplémentaires et 700 Marines venus de Twentynine Palms, mobilisés pour 60 jours.
Gavin Newsom entame une procédure judiciaire pour contester la légalité de ces actions accusées de porter atteinte à la souveraineté de l’État
Mardi 10 juin
La maire Karen Bass instaure un couvre-feu de 20 h à 6 h sur le centre-ville, à la suite de pillages (23 commerces touchés) et de près de 200 arrestations.
Mercredi 11 juin
Les forces de l’ordre et la Garde nationale ont continué à faire respecter le couvre-feu instauré de 20 h à 6 h, utilisant grenades assourdissantes et balles en caoutchouc pour disperser les manifestants présents dans les rues Plus de 200 personnes ont été arrêtées pour violation du couvre‑feu et perturbation de l’ordre public.
Environ 4 000 soldats de la Garde nationale et 700 Marines restent déployés, officiellement chargés de la protection des bâtiments fédéraux et du personnel, non de l’intervention policière directe. L’administration Trump les considère comme essentiels à la sécurité intérieure, malgré le désaccord des autorités locales.
Le gouverneur Gavin Newsom a qualifié ce déploiement de « attaque contre la démocratie » et a lancé une procédure pour contester la légalité, mais un juge fédéral a rejeté sa demande pour suspendre immédiatement cette mobilisation.
“I hereby call into Federal service members and units of the National Guard under 10 U.S.C. 12406 to temporarily protect ICE and other United States Government personnel who are performing Federal functions, including the enforcement of Federal law, and to protect Federal property, at locations where protests against these functions are occurring or are likely to occur based on current threat assessments and planned operations” écrit Donald Trump dans son Memorandum du 7 juin pour justifier les décisions prises.
Donald Trump invoque le Titre 10, qui permet au président de mobiliser les forces armées fédérales pour maintenir l’ordre sans l’accord du gouverneur. Ce mécanisme contourne un autre texte généralement utilisé quand un gouverneur demande lui-même l’aide de la Garde nationale.
Est-ce que totalement illlégal ? Non, mais très rarement utilisé. C’est la première fois depuis 1965 (émeutes de Watts) qu’un président envoie des troupes fédérales à Los Angeles contre la volonté de l’État.
La bataille jurididique a donc pu commencer.
Le gouverneur Gavin Newsom argue que ce déploiement porte atteinte à la souveraineté de la Californie : « La sécurité publique relève en priorité des États. Ce déploiement, sans consultation ni consentement, est un abus de pouvoir. » L’équipe juridique de Newsom évoque le Posse Comitatus Act, une loi de 1878 qui limite l’utilisation de l’armée pour faire respecter la loi à l’intérieur du pays tandis que Donald Trump soutient que les troupes protègent uniquement les infrastructures fédérales, donc ne violent pas cette loi.
Le 10 juin, Newsom a déposé une requête en référé devant un tribunal fédéral à San Francisco pour suspendre immédiatement le déploiement. Le 11 juin, un juge fédéral a rejeté cette demande, estimant que le gouvernement fédéral agit dans les limites de ses pouvoirs constitutionnels ;
L’État de Californie a fait appel de cette décision. Le juge fédéral, Charles Breyer a rendu une ordonnance temporaire en faveur de la Californie, déclarant que le déploiement sous le Titre 10 et la prise de contrôle de la Garde nationale de Californie violaient le 10ᵉ amendement (souveraineté des États) et Le titre 10 U.S.C. § 252, et d’autres dispositions légales
Cette injonction ordonne que le contrôle des troupes soit rendu au gouverneur Newsom, et bloque tout usage fédéral de la Garde de Californie à Los Angeles. L’effet de cet arrêt est suspendu jusqu’au 13 juin midi, et une audience de suivi est prévue le 20 juin
Le gouvernement fédéral a immédiatement fait appel auprès du 9ᵉ circuit, qui a émis une suspension administrative de l’ordonnance de base, maintenant la situation en suspens en attendant une audience rapide prévue le 17 juin
Cette décision marque une première victoire temporaire pour les autorités californiennes dans leur lutte juridique. Les discussions vont se poursuivre dans les prochaines semaines, avec potentiellement un passage devant la Cour suprême, étant donné l’importance constitutionnelle de l’enjeu.
Non content d’avoir semé la pagaille en Californie, Donald Trump pourrait bien étendre ce conflit à d’autres États ou villes démocrates. Il a publié à cet effet un Memorandum (MEMORANDUM FOR THE SECRETARY OF DEFENSE, THE ATTORNEY GENERAL, THE SECRETARY OF HOMELAND SECURITY) qui indique une telle volonté : “Further, I direct and delegate actions as necessary for the Secretary of Defense to coordinate with the Governors of the States and the National Guard Bureau in identifying and ordering into Federal service the appropriate members and units of the National Guard under this authority”. Et il a présenté le déploiement militaire à Los Angeles comme “the first perhaps of many (…) I can inform the rest of the country that when they do it, if they do it, they’re going to be met with equal or greater force than we met right here,” he told journalists in the Oval Office Tuesday”. Parmi les États visés, on peut citer l’Illinois, la Pennsylvanie ou encore le Michigan. Et à l’occasion du défilé militaire qui se tiendra samedi 14 juin, le jour de l’anniversaire du Lider Maximo, des dérapages ne sont pas exclus à l’occasion des nombreuses manifestations qui sont prévues.