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Donald Trump déclare le département de la guerre

Faute d’avoir fait la guerre[i], Donald Trump vient de publier un décret intitulé « Restoring the United States Department of War » visant à réviser l’appellation du département de la défense décidé par Harry Truman en y adjoignant une seconde dénomination Department of War. Un retour à une période ancienne, très ancienne. C’est le 7 août 1789 que George Washington a signé un acte du Congrès. En parallèle, la marine (US Navy) était créée en 1798. C’est en 1947 que le Department of War a été dissous pour être remplacé par le Department of the Army, intégré dans le nouveau National Military Establishment renommé en 1949 Department of Defense.

Avec son esprit très perspicace, Donald Trump explique que Department of War a gagné les guerres de 1812 (la Seconde guerre d’indépendance) et les Première et Seconde Guerres mondiales assurant la « liberté et la prospérité aux Américains ». Depuis, l’Amérique aurait plutôt tendance à avoir perdu les guerres, notamment celles de Corée, du Vietnam et de l’Afghanistan. Alors changeons le nom pour retrouver le goût de la victoire. Une logique implacable.

Expliquer que les Pères fondateurs aient choisi le mot War pour « signaler la force » n’a pas beaucoup de sens tant cette appellation correspondait au vocabulaire de l’époque. En France, on parlait déjà de Secrétariat d’Etat à la Guerre sous Louis XIV. Pendant la première moitié du XXe siècle, le ministère de la Guerre coexiste avec le ministère de la Marine, puis de l’Air. En 1947, les trois ministères sont réunis dans le ministère des Armées avant d’être rebaptisés ministère de la Défense nationale en 1969 pour être de nouveau appelés ministère des Armées en 2017.

Le décret signé par Donald Trump érige la sémantique guerrière en gage de crédibilité militaire. C’est une stratégie rhétorique qui relève de la politique symbolique plus que de la stratégie de défense. Il oppose « War » (offensif, fort, dissuasif) à « Defense » (passif, défensif, donc supposément plus faible). Or, historiquement et stratégiquement, la dissuasion nucléaire, la projection de puissance et la sécurité collective ne dépendent pas du seul lexique.

« Nous avons trop joué en défense, explique Pete Hegseth, nous voulons jouer en offense, un peu comme il parlait de la stratégie d’une équipe de Football américain. Il fallait aussi ajouter que les États-Unis perdaient les guerres, car ils étaient devenus woke. Donald Trump en a profité pour rappeler qu’il avait réglé six ou sept guerres (almots seven). Un nouveau clin d’œil au comité Nobel. Des Guerres qui n’auraient jamais eu lieu s’il avait été président.

Le texte cherche à réintroduire une appellation martiale dans l’appareil d’État, mais de façon d’abord secondaire (titres honorifiques, correspondance, cérémonies). Cela crée une ambiguïté volontaire : une double légitimité symbolique sans modification législative immédiate. Car un changement de nom aurait nécessité un vote du Congrès.

Le plan en deux temps (usage secondaire → recommandation au Congrès pour changement officiel) montre une volonté de tester la faisabilité politique avant de s’attaquer au cadre légal.

Cependant, cette double appellation risque de provoquer :

– Une confusion diplomatique : les interlocuteurs étrangers se demanderont si la doctrine américaine est passée d’une logique de défense à une logique de guerre.

– Des problèmes juridiques : les traités internationaux, accords OTAN et engagements budgétaires font référence au Department of Defense ; une ambiguïté pourrait affaiblir la cohérence.

L’usage du mot « War » envoi un signal agressif, possiblement perçu comme une doctrine d’hostilité permanente. Cela pourrait alimenter la propagande adverse (ex. Chine, Russie, Iran) qui dénonce déjà l’« impérialisme américain ».

Sur le plan intérieur, la rhétorique flatte une partie de l’opinion publique qui associe virilité politique et langage martial. C’est une opération de branding idéologique. Une approche qu’affectionne Donald Trump qui aime à changer les noms (Golfe of America, Mount McKinley…).


[i] Donald Trump a soigneusement d’allé au Vietnam, non pour des raisons morales mais pour commodités personnelles.

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