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6 janvier 2021 : Triste mémoire

Le 6 janvier 2021 restera dans l’histoire des Etats-Unis comme le jour où la démocratie américaine a failli vaciller[1]. Certains penseront sans doute qu’il s’agit là d’une affirmation très excessive, voire grandiloquente.

Près de deux siècles après que les Anglais avaient investi et brulé le Capitole, des membres de l’extrême-droite américaine, de la mouvance des suprémacistes blancs (white supremacists), du consortium MAGA et de la sphère trumpienne, des followers de Donald Trump ont envahi le siège de la première branche des trois pouvoirs, le pouvoir législatif. Que ce serait-il passé si les envahisseurs avaient réussi à attraper le vice-président des Etats-Unis ? L’auraient-il pendu comme le scandaient de nombreux manifestants : “Hang Mike Pence!” Ou était juste-là des vociférations montées en épingle par l’échauffement des esprits dû au mouvement browniens des contestataires.

Un an après cette journée macabre, où en sont les Etats-Unis ? Joe Biden s’était donné comme objectif de calmer le jeu en tournant la page et de faire oublier son prédécesseur. Force est de constater qu’il n’y a pas vraiment réussi. Il faut dire que l’ex-président n’est pas resté inactif et a maintenu une forte pression sur le parti républicain en traçant une ligne de partage très simple : ceux qui croient au Big Lie (que l’élection a été volée, que Joe Biden est illégitime et que lui, Donald Trump est le vrai président), et les autres. Avec un droit de vie politique sur les premiers et de mort politique sur les seconds.

Qui aurait pensé qu’un amateur qui n’avait aucune expérience politique avant de se présenter à la primaire républicaine en 2015 réussirait à avoir une telle emprise sur l’un des deux grands partis, celui d’Abraham Lincoln. Cette réussite n’a été possible que parce 74 millions d’Américains ont voté pour lui en 2020 prenant en tenaille les élus républicains entre Trump d’un côté et les citoyens MAGA de l’autre. D’autant que parmi ces derniers, une minorité bruyante interdit tout retour au calme. Et que leur guide entretient l’imposture avec une très forte ténacité. Pour preuve, un an après la prise du Capitole, il publie un déclaration réitérant la rengaine de la fraude : “Also, why is the primary reason for the people coming to Washington D.C., which is the fraud of the 2020 Presidential Election, not the primary topic of the Unselect Committee’s investigation? This was, indeed, the Crime of the Century”.  Si tout le monde ne connaît pas l’assertion, Donald Trump, lui, en est certainement convaincu : « Un mensonge répété dix fois reste un mensonge ; répété dix mille fois, il devient la vérité. »

Statement by Donald J. Trump, 45th President of the United States of America
01/04/22

In light of the total bias and dishonesty of the January 6th Unselect Committee of Democrats, two failed Republicans, and the Fake News Media, I am canceling the January 6th Press Conference at Mar-a-Lago on Thursday, and instead will discuss many of those important topics at my rally on Saturday, January 15th, in Arizona—It will be a big crowd! What has become more and more obvious to ALL is that the LameStream Media will not report the facts that Nancy Pelosi and the Capitol Sergeant-at-Arms denied requests for the D.C. National Guard or Military to be present at the Capitol. Their emails and correspondence with the Department of Defense exist, but the media won’t ask for this evidence, or report the truth!

This is the Democrats’ Great Cover-Up Committee and the Media is complicit. Why did Adam “Shifty” Schiff forge and change the statement of Congressman Jim Jordan without any consequence? Why will Crazy Nancy Pelosi not provide her communications with the House Sergeant-at-Arms and the House Chief Administrative Officer, or promise to retain these vital messages, which many feel she has already destroyed—perhaps illegally? Also, why is the primary reason for the people coming to Washington D.C., which is the fraud of the 2020 Presidential Election, not the primary topic of the Unselect Committee’s investigation? This was, indeed, the Crime of the Century.


Depuis cette date fatidique, le ministère de la Justice a arrêté plusieurs centaines d’émeutiers et déjà condamné 250 d’entre eux. De son côté, la commission 1/6, mis en place le 1er janvier dernier continue son enquête et a accumulé des centaines de témoignages et de documents qui montrent assez clairement que Team Trump avait concocté un coup d’état.

Après le memo de 6 pages de John Eastman, puis le Powerpoint de 36 pages, voici le document de 22 pages intitulé : « STRATEGIC COMMUNICATIONS PLAN GIULIANI PRESIDENTIAL LEGAL DEFENSE TEAM We Have 10 Days To Execute This Plan & Certify President Trump! » expliquant ce qui doit être fait pour garder Donald Trump à la Maison Blanche. Ces dix jours de tous les dangers courent du 27 décembre 2020 au 6 janvier 2021. L’objet de ce document est : « Nationwide communications outreach campaign to educate the public on the fraud numbers, and inspire citizens to call upon legislators and Members of Congress to disregard the fraudulent vote count and certify the duly-elected President Trump ».

Ce document, qui décrit par le menu ce que l’on peut qualifier de tentative de coup d’état, est fondé sur le mensonge, l’affabulation, le bobard, l’imposture que les élections ont été frauduleuses. Et pourtant, l’auteur du rapport ne ménage pas ses efforts pour faire croire à des fraudes qui, faut-il le rappeler ont toutes été réfutées : « Dead people voted, Underage people voted, Voters who voted numerous time, Ineligible people voted, Overvote, Vote Counting, Illegalities, Fraudulent Ballots, Mail-in Ballots Fraud, Dominion Machines Fraud, Election Officials’ Illegal Actions…

Répéter un mensonge mille fois n’en fait pas une vérité tout comme aligner mille mensonges. Parmi les points les plus absurdes et ridicules :
– Dominion is a foreign-controlled and foreign-owned company ;
– Smartmatic is a foreign-controlled and foreign-owned company ;
– Dominion machines have a “poison pill” in their software that automatically deletes the records within the voting machines ;
– Dominion contains software from Venezuelan firm Smartmatic ;
– Smartmatic was founded and financed by Hugo Chavez to control voting out comes in Venezuela ;
– We have affidavits of witnesses who met with Maduro family members who said that this vote-theft technology is used to control his elections as well.

Si le sujet n’était pas aussi sérieux, on pourrait en rire à gorge déployée.

Le document concentre son action sur six états (Arizona, Géorgie, Michigan, Nevada, Pennsylvanie, Wisconsin), les six états qui, en raison du système électoral américain indirect, ont fait basculer le résultat en faveur de Joe Biden. Rappelons que le candidat démocrate a recueilli 7 millions de voix de plus que son opposant républicain. Dans une élection directe, Joe Biden aurait gagné cette élection sans l’ombre d’un doute mais nous sommes aux Etats-Unis.

Parmi les messages totalement outranciers et dangereux, on peut citer : « You cannot let america itself be stolen by criminals – you must take a stand and you must take it today ». Des messages qui sont à l’origine de l’idée désormais répandue selon laquelle l’usage de la violence contre le gouvernement est légitime et partagée par 40 % des républicains et 23 % des démocrates.

On ne peut qu’être assez sceptique sur le résultat de l’enquête menée par la Commission. Car même si le rapport apportait les preuves indiscutables que Donald Trump a fomenté un coup d’état, ses fans ne le croiront pas, ne le croiront jamais. Il deviendra alors un martyr pour lesquels ils seront peut-être prêts à prendre les armes dans la même logique qu’ils ont envahi le Capitole parce qu’ils étaient certains que l’élection leur avait été volée.

Maintenant, il faut regarder l’avenir. Et l’avenir est assez sombre si l’on considère 2020 comme un tour de chauffe de 2024. C’est une idée qui est de plus en plus partagée et que défend Philip Rotner dans un article intitulé « Five Rudys from the Abyss » dans lequel il explique qu’il s’en ait fallu de peu pour les élections de 2020 basculent en faveur de Donald Trump : Il aurait suffi de cinq Rudy Giuliani aux postes clés de cette élection pour atteindre le résultat. Un Rudy à la place de Brad Raffensperger, le secretary of state de Géorgie, un autre à la place de Aaron Van Langevelde, Board of State Canvassers member de l’état du Michigan, un troisième à la place de Kathy Boockvar qui a certifié les votes des grands électeurs de l’état, un quatrième à la place de Bill Barr, le ministre de la Justice qui a refusé de déclarer que les élections ont été truquées et un dernier à la place de Mike Pence, vice-président qui a certifié les votes des grands électeurs le 6 janvier et le tour était joué. Ces seuls trois états donnaient les 42 votes de grands électeurs à Donald Trump lui permettant d’être élu président. Et cinq Rudy Giuliani, ça se trouve assez facilement par les temps qui courent.

En 2020, Donald Trump n’avait pas porté ses efforts sur tous les détails qui auraient permis sa réélection. Depuis un an, il place ses pions dans des primaires républicaines en soutenant des candidats affidés qui sauront prendre les bonnes décisions lorsque le moment sera venu. Sans parler des lois votées par des congrès d’états républicains et signées par leur gouverneur qui rendent plus difficile l’exercice du droit de vote pour les minorités – qui votent traditionnellement démocrates. Autant d’initiatives facilitant ainsi l’opération « coup d’état 2024 ».

La démocratie n’est pas une évidence ni une certitude mais un exercice au quotidien. Doit-on commémorer le 6 janvier puisque désormais Every Day Is Jan. 6 Now si l’on en croit le New York Times.

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[1]
Pour une petite partie, c’est le jour où certains Américains se sont levés contre la tyrannie et le coup des démocrates qui ont volé une élection

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